Archives mensuelles : Mai 2022

Le mot du lundi : épanorthose, n.f.

Vous l’ignorez peut-être, mais vous employez souvent des épanorthoses.

Via cette figure de rhétorique, il s’agit, en corrigeant ou en nuançant ses propos, d’atténuer ou au contraire de renforcer une idée.

Par exemple :

  • son comportement me choque, disons me perturbe ;
  • cet homme est fantaisiste, voire fou ;
  • cette femme est mince, que dis-je, maigre.

Voici deux synonymes d’épanorthose : rétroaction, palinodie.

Pour aller plus loin, je vous ajoute un lien intéressant :

http://unige.ch/lettres/framo/enseignements/methodes/frhetorique/fr022200.html

Passez un bon lundi !

Une éducation catholique, Catherine CUSSET (2014)

Récemment, j’ai relu Une éducation catholique de Catherine CUSSET, publié en 2014.

Initialement je ne savais rien de l’autrice, j’avais découvert son œuvre L’Autre qu’on adorait, roman que j’avais lu en une journée, incapable de m’en détourner avant la fin. Aujourd’hui je ne sais peut-être toujours rien de Catherine Cusset, sinon cette éducation catholique, entre un père pratiquant et une mère athée.

Les problématiques de l’autofiction et de l’autobiographie me paraissent fondamentales à approfondir.

Jusqu’où va l’autofiction ? Je vous propose un lien, il s’agit de l’écrivain qui présente son œuvre sur Youtube : https://www.youtube.com/watch?vgmYSboVzU’U

J’avoue ne pas savoir quoi ajouter sur son roman ce soir, tant les critiques, résumés et autres écrits antérieurs me semblent tomber juste. Par exemple, cette critique, entre tant d’autres, de Christine Ferniot (Télérama) :

http://www.telerama.fr/livres/une-education-catholique,118696.php

Je ne peux que vous livrer mes impressions : j’ai lu Une éducation catholique d’une traite, l’écriture est alerte, le récit bien mené… Et puis Dieu dans tout ça, j’avoue être impressionnée par la manière dont la narratrice, Marie, parle du Verbe, de la Croix… Point de verbiage pseudo érudit de ma part, juste le sentiment d’avoir lu un beau livre, qui résonne en moi et en mon histoire.

A demain !

Où j’emploie essentiellement des mots surannés

Un discours suranné presque insensé

Ce jour-là, alors que je m’en allai baguenauder, serrant contre moi ma bougette, je laissais aller mes pensées. Je n’avais sur moi que brimborions et autres colifichets. Je ne me sentais encline à proférer nul propos sinon de vaines billevesées. Si je ne suis certes pas une coquebine, je débite d’ordinaire peu de coquecigrues. Mon élocution n’est point faconde, mais de là à proférer des fariboles ! Parfois j’entends jaspiner, mais je m’avère rapidement jobarde. C’est pourquoi je garde le nez dans mes miscellanées. J’évite misologie et misonéisme. Je crains nescience ; alors ce soir, allais-je musarder, cédant à la nitescence ? Je me confonds souvent en palinodies, voire je verse dans le panégyrique. Je suis un parangon de vertu, je me méfie des péroraisons. Ce soir je me perds en prolégomènes, j’imagine user de prolepses et analepses, discourant de manière par trop prolixe, voire versant dans le psittacisme. Mais je ratiocine. Pire ! Je soliloque.

A suivre.

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Vocabulaire

Baguenauder : se promener en flânant

Bougette : petit sac

Brimborion : petit objet de peu de valeur

Billevesée : parole vide de sens

Coquebine : femme innocente

Coquecigrue : baliverne, absurdité

Faconde : élocution facile

Faribole : propos vain et frivole

Miscellanées : recueils

Misologie : haine du logos

Misonéisme : hostilité au changement

Nescience : ignorance

Nitescence : clarté

Palinodie : conclusion

Parangon : modèle

Péroraison : discours creux

Prolégomènes : principes préliminaires à l’étude d’une question

Psittacisme : répétition mécanique

Ratiociner : se perdre en raisonnements subtils

Note : 1 sur 5.

Henry JAMES, Le Tour d’écrou (1898)

Je viens de finir le Tour d’écrou d’Heny James, ce fut une lecture prenante, captivante !

L’histoire, qui est d’abord racontée au sein d’un cercle d’amis un soir de Noël – il y a donc mise en abyme -, se déroule dans un vieux château anglais isolé, Bly.

Une jeune institutrice est chargée de s’occuper de Flora, une charmante petite fille orpheline, bientôt rejointe par son frère Miles, non moins charmant, pourtant mystérieusement renvoyé de son collège.

Le récit est à la première personne, on entre ainsi dans les pensées de la narratrice, et, pour ma part, j’ai pris automatiquement parti pour elle.

Car si initialement tout se passe à merveille, les enfants se révèlent moins lisses et polis qu’ils y paraissent…

L’apparition de deux spectres aux yeux de la narratrice constitue l’élément perturbateur : l’institutrice fera le rapprochement, grâce aux propos de la gouvernante, Mrs. Grose, avec deux anciens domestiques, Peter Quint et Miss Jessel.

Dès lors, l’attitude des enfants s’avère ambiguë. Et la situation se dégrade…

Y a-t-il réellement des fantômes ? Qui les voit ? Que sait la gouvernante ? L’institutrice est-elle folle ? Vous savez ce qu’il vous reste à faire pour le savoir !

Bonne lecture !

Pour une analyse approfondie, notamment autour de la relation scopique :

LE RUN Jean-Louis, « Anges ou démons : jeux de regards dans Le tour d’écrou d’Henry James », Enfances & Psy, 2008/4 (n° 41), p. 106-122. DOI : 10.3917/ep.041.0106. URL : https://www.cairn.info/revue-enfances-et-psy-2008-4-page-106.htm

Derail-Imbert Agnès. Le Tour d’écrou ou l’illusion tragique. In: Revue Française d’Etudes Américaines, N°82, octobre 1999. La Tragédie : variations américaines. pp. 58-70.

DOI : https://doi.org/10.3406/rfea.1999.1786

www.persee.fr/doc/rfea_0397-7870_1999_num_82_1_1786

Edition : Henry JAMES, Le Tour d’écrou, OKNO éditions, 2020.

Le mot du lundi : acroamatique, adj.

Bonjour !

L’adjectif acroamatique vient du grec ancien (« entendre »). Il signifie « qui est reçu par l’oreille ».

Le Littré précise que l’enseignement acroamatique correspond à l’enseignement oral – il renvoie à l’enseignement d’Aristote – par opposition à l’enseignement par les livres.

Ainsi le maître, qui communiquait de vive voix à ses élèves initiés, leur délivrait un enseignement profond, qui ne figurait pas dans les livres et leur était exclusivement destiné (pas de vulgarisation).

Trois points pour aller plus loin :

  • au sujet d’Aristote, j’ai lu qu’il traitait de questions métaphysiques adressées le matin à ses seuls initiés, et le soir, il abordait des thèmes concrets accessibles à un public plus large ;
  • j’ai aussi lu que l’acroamatique ne nécessite pas forcément que ce qui est donné pour exister soit prouvé par les sens ;
  • enfin il est essentiellement question du travail cognitif dans les disciplines de la raison pure (si vous souhaitez poursuivre…).

Bonne journée !

Le mot du lundi : antépiphore, n.f.

Bonjour !

Qu’est-ce qu’une antépiphore ?

En poésie comme en prose, une antépiphore renvoie à la reprise/répétition d’éléments au début et à la fin d’une strophe, d’une phrase ou d’un ensemble verbal comme un paragraphe ou une période, et qui confère à l’ensemble un effet de refrain.

L’exemple suivant, extrait du poème « L’Irréparable » de Baudelaire, (poème lui-même extrait des Fleurs du Mal, publié en 1857) vous éclairera davantage :

« Adorable sorcière, aimes-tu les damnés ?

Dis, connais-tu l’irrémissible ?

Connais-tu le remords aux traits empoisonnés ?

A qui notre cœur sert de cible ?

Adorable sorcière, aimes-tu les damnés ? »

Si vous souhaitez aller plus loin, vous pouvez vous référez à deux autres termes proches, la symploque et l’inclusion, dont je parlerai une autre fois.

Pour aller encore plus loin, un article cité sur le site de Cairn (un site extrêmement riche, fouillé et pointu) : https://www.cairn.info/jeux-verbaux-et-creations-verbales–9782200619503-page-109.htm

Bon début de semaine !

Le Larousse 2023 accueille 150 nouveaux mots

Bonjour !

150 nouveaux mots rejoignent les rangs du dictionnaire. Il s’agit à la fois de « wokisme », de « grossophobie », « enfermiste », « visio »… Des mots en somme qui collent avec l’actualité.

Si en théorie je suis favorable à l’idée que la langue française évolue, j’avoue être toutefois réservée, voire perplexe, face à certains termes.

A quoi sert le dictionnaire ?

Bon. N’oublions pas qu’un dictionnaire, en plus d’apporter des informations fiables, est censé refléter son époque, et que si je n’y trouve pas, disons, « wokisme », je ne comprendrai pas certains propos ou articles qui le mentionnent (à moins, bien sûr, de le chercher dans d’autres sources, sur internet par exemple, mais cela demande d’effectuer un certain tri).

Le débat est lancé : que pensez-vous de l’introduction de nouveaux mots dans le dictionnaire ? Est-ce que cela le dénature (je pense surtout aux anglicismes) ou au contraire est-ce que cela l’enrichit, quels que soient les termes ajoutés ?

J’en profite pour partager avec vous des articles que j’ai trouvé intéressants :

https://www.lefigaro.fr/langue-francaise/actu-des-mots/wokisme-autrice-grossophobie-les-nouveaux-mots-du-petit-robert-2023-20220509

https://www.francetvinfo.fr/culture/larousse-2023-150-nouveaux-mots-ont-integre-le-dictionnaire_5129497.html

https://www.huffingtonpost.fr/entry/larousse-2023-voici-les-nouveaux-mots-du-dictionnaire_fr_6279875fe4b03ca8364543b8

Passez une bonne journée !

Ma PAL

J’ai réuni plusieurs ouvrages.

Je ne les ai pas encore lus intégralement, je les ai commencés ou je les ai lus il y a si longtemps qu’une mise à jour s’impose.

C’est très hétéroclite, en termes d’époque, de géographie, de sujet, d’auteur, on passe de Marguerite de Navarre à Lionel Shriver, de Kafka à Doris Lessing et son magnifique Carnet d’or.

Je vous en parle bientôt, je commence actuellement Adieu, mon livre ! d’ÔE Kenzaburô, publié aux éditions Philippe Picquier. D’après ce que j’ai lu, il est truffé de références littéraires, une vraie pépite !

En vrac, pour inaugurer ma rubrique « ponctuation »

En vrac, voici quelques règles de base ou éléments relatifs à la ponctuation :

  • , etc. est toujours précédé d’une virgule et suivi d’un point (et surtout pas de points de suspension).
  • En orthotypographie, le terme espace est féminin : une espace.
  • Dans une phrase, le sujet ne peut pas être séparé du verbe par une seule virgule (cela se produit plus souvent qu’on ne le pense). Par exemple, cette phrase est incorrecte : Persée, trancha la tête de Méduse. En revanche la phrase suivante est correcte : Persée, caché dans la pénombre de la grotte, trancha la tête de Méduse.

Si comme moi, la ponctuation vous passionne, si vous voulez en savoir plus sur l’usage des parenthèses, des tirets ou encore du point-virgule, je vous invite à lire le Traité de la ponctuation française de Jacques DRILLON, Gallimard, 1991.

Bonne soirée ! 😉

Wu XIAOLE, Les enfants des riches (2018)

Je viens de lire d’un trait Les enfants des riches (2018) de Wu Xiaole et j’ai adoré ce roman.

L’histoire se déroule de nos jours à Taïwan. Yunxian est mariée avec Dingguo ; ils ont un fils, Peichen, qui entre en primaire.

Yunxian demeure obsédée en permanence par l’appartement que son époux lui avait promis, dont il devait hériter et sur lequel ils ont dû tirer un trait après leur mariage. Si d’emblée, la jeune femme apparaît comme envieuse et cupide – elle rêve notamment d’une vie plus belle, plus aisée surtout que celle que mène sa sœur – elle est aussi obnubilée par ce qu’elle imagine être le rôle d’une mère parfaite.

Dans une société marquée par un système éducatif extrêmement compétitif, Yunxian se montre progressivement sur-préoccupée par l’éducation de son fils.

La jeune femme fait la connaissance du patron de Dingguo, Cai Wande (Ted), et de sa femme Jiaqi lors d’une fête d’anniversaire organisée par ces derniers. Yunxian s’y rend d’abord à contrecœur, dans l’espoir unique que Dingguo obtienne une promotion. Puis leurs deux fils se lient d’amitié.

Yunxian s’avère fascinée autant qu’intimidée par ce milieu qui lui semble incarner la perfection. Tout y est grand, beau, de bon goût.

« L’ascenseur s’ouvrit sur deux portes ; celle de gauche menait au somptueux appartement de la famille Cai. Une table basse carrée en bois de cerisier agrémentait l’entrée, le vase en porcelaine posé dessus figurant des carpes koi et des fleurs de lotus dans un étang. Le résultat était saisissant de vie et de magie. »

C’est lors de cette fête que l’histoire s’amorce réellement puisque à son terme Jiaqi fait une proposition incroyable à Yunxian : le patron de Dingguo prendra en charge les frais de scolarité de Peichen dans une école privée très cotée où leur fils Haoqian (Chris) sera également inscrit.

Comment refuser une proposition aussi alléchante lorsqu’on ne pourrait payer de tels frais de scolarité qu’au prix d’énormes sacrifices et lorsqu’on est persuadé.e que l’avenir de son enfant en dépend ?

Mais un tel arrangement ne peut être sans contrepartie : Yunxian va l’apprendre à ses dépens.

Bonne journée à vous !

Edition : Wu XIAOLE, Les Enfants des riches, Editions Payot & Rivages, 2022.