Archives mensuelles : juin 2022

George SAND, Pauline (1841)

Je suis précisément en train de lire Pauline (1841) de George SAND.

C’est un roman plutôt court, dont l’intrigue apparaît rapidement en filigrane, et où sont essentiellement dressés deux portraits de jeunes femmes que tout oppose.

L’une, Laurence, mène une vie trépidante de comédienne à Paris où elle vit avec sa mère. L’autre, Pauline, vit en province aux côtés de sa vieille mère infirme.

Elles se connaissent pourtant.

Un hasard de voyage va conduire Laurence à Saint-Front, cette petite ville de province où demeure Pauline et où Laurence elle-même vécut, enfant.

Malgré une certaine confusion, des choix et des valeurs différents, les retrouvailles des deux amies sont des plus affectueuses, au point que Laurence accueille Pauline dans sa demeure parisienne à la mort de sa mère.

Lors de mondanités, Pauline rencontre Montgenays, un homme du monde, calculateur et pédant, qui la flatte puis feint bientôt des sentiments à son égard : il s’agit en réalité de séduire Pauline pour conquérir Laurence. Le plan manque toutefois de subtilité…

Bonne soirée !

Le mot du lundi : billevesée, n.f.

Bonjour !

Aujourd’hui j’ai choisi de définir le terme billevesée. Si vous me suivez, vous l’aurez déjà relevé dans un précédent article. Ce substantif féminin :

  • renvoie à des propos ou une idée vides de sens, voire, selon le Cnrtl, souvent erronés, ou encore ridicules selon le Dictionnaire de l’Académie française. Ses synonymes sont « baliverne », « faribole », « sornette » ;
  • signifie par extension une idée, un comportement, une occupation ou une préoccupation frivoles. Ses synonymes sont alors « futilité », « chimère », « niaiserie ».

Notons que le terme billevesée est principalement employé au pluriel, comme dans cet extrait de Notre-Dame de Paris de Victor HUGO (1832) :

« − Eh ! Parle, cette vie que tu te fais si charmante, qui te l’a conservée ? À qui dois-tu de respirer cet air, de voir ce ciel, et de pouvoir encore amuser ton esprit d’alouette de billevesées et de folies ? Sans elle, où serais-tu ? »

Passez une bonne journée !

Le mot du lundi : tmèse, n.f.

Bonjour !

Le terme tmèse est une figure de construction, sous-classée figure de déstructuration.

Elle vient du bas latin tmesis, du grec tmêsis, « coupure ».

Dès lors, qu’est-ce qu’une tmèse ?

Il s’agit de l’insertion d’un ou plusieurs mots provoquant la division

  • d’un mot composé ou
  • d’un groupe de mots indissociables.

Voici un exemple issu du recueil Charmes de Paul Valéry ; le poème s’intitule « L’Abeille » :

« Quelle, et si fine, et si mortelle,

Que soit ta pointe, blonde abeille,

Je n’ai, sur ma tendre corbeille,

Jeté qu’un songe de dentelle. »

On note ainsi la disjonction inattendue entre « quelle » et « que » dans les deux premiers vers.

Soulignons enfin que la tmèse est surtout fréquente en poésie : le poète possède l’espace où déployer sa créativité.

Passez une bonne journée !

Sylvia PLATH (1932-1963)

Sylvia PLATH est une autrice américaine du XXe siècle. Romancière (La Cloche de détresse), poète, elle écrivit également des nouvelles, des contes, des essais et tint un journal intime assidûment avant de se suicider en février 1963.

Son œuvre, où s’incarne un univers mortifère, est marquée par le vide et la mélancolie.

Quelques unes des œuvres de Sylvia Plath

  • The Colossus (1960)
  • The Bell Jar (1963)
  • Ariel (1965)
  • Winter trees (1971)
  • Crossing the Water (1971)

Les thèmes récurrents

Les thèmes que Sylvia Plath aborde sont essentiellement l’accès des femmes à l’indépendance ainsi que la santé mentale (elle-même a notamment souffert de dépression au début de sa vie d’adulte), la sexualité, la mort ainsi que le suicide.

Sa poésie est très personnelle, on la qualifie de poésie confessionnelle. Les émotions, les sentiments, les idées souvent sombres sont ainsi mis en exergue. Quant à son roman, la Cloche de détresse, il est semi-autobiographique puisqu’il relève de la fiction auxquels s’ajoutent des éléments significatifs de la vie de l’autrice.

Son rapport à l’écriture

Si Sylvia Plath ressent le besoin impératif d’écrire, elle se dit aussi « pétrifiée » par l’écriture. Se mêlent alors à la fois « l’appréhension parfois de ne pas écrire » (NEAU, Françoise), et celle d’écrire.

Notons que lorsqu’elle est enseignante, elle manque de temps à consacrer à l’écriture ce qui engendre chez elle une grande frustration.

Sylvia Plath est par ailleurs obsédée par la notion de souvenir, pour elle l’écriture passe nécessairement par le souvenir, il s’agit de « recréer la vie vécue, la renouveler » (citation extraite du journal de Sylvia Plath et reprise par NEAU, Françoise).

Il convient, enfin, de souligner le travail d’écriture par rapport à la thématique obsessionnelle du vide chère à Sylvia Plath ; il s’agit bien pour elle d’un travail, d’un « labeur pour combler le vide » (NEAU, Françoise, p.101), toujours guidé par son exigence de perfection.

Bibliographie

NEAU Françoise, « Sylvia Plath et l’urgence d’écrire », Libres cahiers pour la psychanalyse, 2014/2 (N° 30), p. 93-112. DOI : 10.3917/lcpp.030.0093. URL : https://www.cairn.info/revue-libres-cahiers-pour-la-psychanalyse-2014-2-page-93.htm

NEAU Françoise, « « Vivre et écrire » dans les Journaux de Sylvia Plath », Le Coq-héron, 2014/4 (n° 219), p. 98-104. DOI : 10.3917/cohe.219.0098. URL : https://www.cairn.info/revue-le-coq-heron-2014-4-page-98.htm

MORENCY, C. (2012). Compte rendu de [La part glorieuse de Sylvia Plath /
Œuvres. Poèmes, romans, nouvelles, contes, essais, journaux de Sylvia Plath,
Gallimard, 1 284 p.] Spirale, (241), 68–70.

Radhika JHA, La Beauté du diable (2014)

Kayo, la narratrice, est une mère au foyer modeste ; elle mène une vie simple et conventionnelle. Il lui arrive toutefois d’être en proie à des angoisses et à l’ennui – ce qu’elle nomme la makkura, qui signifie en japonais « noir absolu, noir complet ».

« La makkura (…) s’abattait sur moi brusquement, profonde et infinie, plus sombre que le fond de l’océan par une nuit sans lune, m’enveloppant l’esprit si complètement que je restais cloîtrée chez moi, fenêtres et rideaux fermés, lumières éteintes, et perdais toute notion du temps. » (p.79)

Alors que Kayo est habituée à un mode de vie modeste, à l’occasion de son anniversaire, elle reçoit de sa mère une somme d’argent importante ainsi qu’une carte de crédit. Elle l’ignore encore, mais cela va marquer les prémices d’une nouvelle vie – d’une meilleure vie ?

« Je me rappelle comme la carte brillait. Elle n’était pas dorée comme celle de Ryu, juste bleu et argent.  Mais je l’ai adorée. Je l’ai soigneusement cachée, persuadée que je ne l’utiliserais jamais. 

Sauf que bien sûr, je m’en suis servie. »

C’est d’ailleurs son époux, Ryu, qui l’encourage le premier à aller faire du shopping.

Un jour alors que Kayo déambule dans Tokyo, elle rencontre inopinément une amie d’enfance, Tomoko.

Tomoko est belle et joliment vêtue, élégante, c’est une « office lady », c’est-à-dire qu’elle exerce un emploi par opposition à la position de mère au foyer.

Elle entraine Kayo dans les grands magasins (les departo) où elle l’initie rapidement aux délices éphémères du shopping, des talons hauts et de l’apparence.

Un jour Tomoko disparaît de la vie de son amie.

Mais la machine est lancée à toute vitesse, et Kayo dépense tout son argent en futilités jusqu’à l’endettement. Elle trouve un arrangement, reprend ses folles dépenses, impuissante à renoncer à l’euphorie que les achats lui procurent. L’arrangement ne dure pas, Kayo va devoir trouver une solution pérenne pour assouvir son désir des belles choses sans que son époux ne soit au courant.

Entre temps elle a retrouvé la trace de son amie Tomoko.

Jusqu’où va-t-elle l’imiter ?

Edition choisie : Radhika JHA, La Beauté du diable, Editions Philippe Picquier, 2016 (édition de poche)

Le mot du lundi : symploque, n.f.

Bonjour !

J’ai déjà mentionné le terme symploque dans un précédent article. Un décryptage s’impose alors !

La symploque réunit l’épiphore et l’anaphore, soit respectivement une répétition en fin de phrase et une répétition en début de phrase.

Voici un exemple de symploque, extrait de DIDEROT, Denis, Correspondance, Paris, Éditions de Minuit, 1955-1970, 16 vol. Éditée par Georges Roth, puis par Jean Varloot :

« Tu diras que c’est là se démener diablement ; et tu auras raison. Tu diras que ce n’est pas la peine de tant tourner, pour trouver le dernier sommeil ; et tu auras raison. Tu diras qu’il faut revenir le plus tôt possible et par le plus court chemin ; et tu auras raison » (lettre de Diderot à sa femme, octobre 1773, éd. Roth-Varloot, vol. XIII, p. 73).

Je tiens à préciser que, bien qu’ayant lu Diderot, je n’ai pas encore lu sa Correspondance. J’ai trouvé cet exemple sur un site incroyable, L’Oreille tendue : L’Oreille tendue | Langue, culture, sport |

Passez un bon lundi !

Le mot du lundi : irréfragable, adj. v.

J’ai rencontré le terme irréfragable alors que je lisais le roman de Benjamin Constant dont je vous ai déjà parlé, Adolphe (1817) :

« Ellénore n’avait eu jusqu’alors aucune notion de ce sentiment passionné, de cette existence perdue dans la sienne, dont mes fureurs mêmes, mes injustices et mes reproches, n’étaient que des preuves plus irréfragables » (Benjamin CONSTANT, Adolphe, Flammarion, édition 1989, p.81).

Selon le Larousse en ligne, cet adjectif qualificatif signifie « qu’on ne peut récuser ».

Le CNRTL nous apporte quelques précisions sur l’origine du terme irréfragable : il est emprunté au bas latin irrefragabilis, c’est-à-dire « irréfutable », dérivé du latin classique regrafari, « voter contre, s’opposer à ».

Synonymes : incontestable, indéniable, irrécusable.

Bonne journée !

Allo ?

Savez-vous pourquoi on dit « allo » lorsqu’on répond au téléphone ?

Il existe plusieurs réponses. La mienne provient d’une de mes professeures de hongrois lors de mon séjour à Budapest (il y a un paquet d’années, pendant un échange organisé par la Sorbonne).

En hongrois, Hallom signifie « j’écoute ». Le terme se serait transformé en « allo » et l’expression que nous employons aujourd’hui se serait ainsi popularisée.

Bonne soirée !

KIM Hoon, En Beauté (2004)

En beauté est un roman coréen bref qui s’ouvre sur la mort d’une femme : « – C’est fini. » Les premières phrases donnent le ton.

On suit alors le cheminement des pensées de l’époux, qui revit la maladie depuis deux ans, dans toute sa corporéité.

Par ailleurs, alors qu’il est en deuil, l’homme, qui est directeur commercial, doit faire face à l’urgence et la pression d’une campagne publicitaire de cosmétiques.

Les propos sont bruts, les termes relatifs à la maladie et à la mort sont très crus, voire cruels.

Un roman dur par ses descriptions presque cliniques, organiques.

Edition choisie : KIM Hoon, En Beauté, Editions Philippe Picquier, 2004 (édition de poche)