Je vous l’avoue, mais peut-être l’aviez-vous obervé, j’ai une certaine propension à choisir pour cette rubrique des mots déchus.
Aujourd’hui, ce sera un terme populaire, soit le verbe (s’)emberlucoquer.
Ce verbe, que je connais pour son apparition dans l’œuvre de Rabelais, figure dans peu de documents explicatifs, qu’ils soient en ligne ou imprimés. Il pose par ailleurs, on va le voir, un problème relatif à son caractère pronominal (pour rappel, les verbes pronominaux se conjuguent avec un pronom réfléchi « me, te, se, nous, vous) ou non pronominal.
Selon le Littré, s’emberlocoquer, verbe réfléchi, signifie « s’entêter d’une idée, s’attacher aveuglément à une opinion ».
Un verbe pronominal ? Controverse
En effet, j’ai d’abord relevé la définition « embarrasser, troubler, remplir l’esprit de chimères », induisant qu’il ne s’agit pas là d’un verbe pronominal (absence de pronom réfléchi).
Pourtant selon d’autres sources, le verbe s’emberlucoquer semble être un verbe exclusivement ou plus précisément « essentiellement » pronominal. Ainsi dans le dictionnaire de l’Académie française de 1762, il est défini comme verbe pronominal réfléchi, terme populaire, signifiant « se coiffer d’une opinion, s’en préoccuper tellement, qu’on en juge aussi mal que si on avait la berlue ». Dans l’édition de 1798, il est notifié que ce verbe ne s’emploie qu’avec un pronom personnel.
Rabelais
Revenons à Rabelais. On trouve plusieurs occurrences du verbe (s’)emberlucoquer dans son œuvre, notamment dans le livre I, chapitre VI :
« Ha, pour grace, n’emberlucoquer jamais vos esperitz de ces vaines pensées ».
En note de bas de page, il s’agit de « s’emplir la tête de chimères semblables à celles que les Moines ont accoûtumé de loger fous leurs capuchons de bures ».
Une origine floue
Enfin, si son origine est inconnue, ce verbe pourrait être construit sur le terme embrouiller ou berlue, berlu, (hurluberlu) et coquer, coque, capuchon = s’encapuchonner de berlue, voir des choses qui ne sont pas.
Passez une bonne semaine !